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Economique On se rappellera qu’au XVIème siècle, l’Europe était très touchée par une inflation intense provoquée par l’arrivée massive d’or et d’argent ramenés de l’Amérique. C’était aussi le début du refroidissement de la planète, qui a diminué les récoltes. S’il y avait quelques avancées dans la métallurgie, il y avait très peu d’innovations techniques dans l’agriculteur qui auraient pu renforcer les récoltes malgré le changement climatique. Cependant, l’Europe a connu une croissance démographique et vers la fin du XVIème siècle a même pu atteindre son niveau d’avant la Peste noire. Cette conjoncture de faibles récoltes et croissance démographique a entrainé une paupérisation importante. Au XVIIème siècle, comme les mercantilistes le préconisaient, les monarchies ont investi dans l’industrie, ce qui apporte un certain progrès technique. De plus, la croissance démographique s’était tarie au début du siècle, maintenant la demande de denrées de base à un niveau relativement constant. Ce n’est qu’au XVIIIème siècle qu’on voit apparaître l’industrialisation, et seulement en Angleterre. L’investissement royal en France s’est limité à un nombre très limité d’industries, principalement de luxe. De plus, les gildes et les corporations de métiers contrôlent très étroitement la production artisanale à un niveau très local, limitant ainsi la possibilité de développement industriel. Non sans rapport, l’agriculture en France aussi était moins productive qu’en Angleterre. Arthur Young (1741-1820), agriculteur et agronome britannique, décrit dans son Voyage en France (1792) des techniques agricoles très arriérées en France. Pour chaque setier de grains semé, les domaines anglais en produisaient 12 setiers, alors que les agriculteurs français ne tiraient que cinq setiers. La production limitée, aussi bien en agriculture qu’en industrie, crée un déficit commercial en France. Alors qu’en Angleterre se lance dans un processus d’industrialisation, l’économie française reste foncièrement agricole. Cette situation va amener les philosophes français à réfléchir sur la question de la terre et le travail. Politique Au XVIIème siècle, l’Angleterre est déchirée par la Guerre civile (1642-1651). Les tensions entre différentes factions de Protestants et la résistance du Parlement à la monarchie absolue entraîne la décapitation de Charles Ier et l’instauration du « Commonwealth of England » dirigé par Oliver Cromwell. Le Commonwealth ne dure que dix ans et Charles II est restauré au trône en 1660, mais le système politique, sous la forme de monarchie parlementaire, est plus démocratique qu’avant. L’Angleterre ne cesse d’étendre et renforcer son Empire en Amérique, Afrique et Inde. Au milieu du XVIIIème siècle l’Angleterre est l’un des pays les plus puissants du monde. En France, Louis XIV (1638-1715, roi en 1643) instaure une monarchie absolue et maintien une paix intérieure relative. Mais au XVIIIème siècle, les soulèvements populaires se multiplient. La Révolution française (1789-1799) se culmine par la décapitation de Louis XVI en 1793 et se détériore en « Terreur » pendant jusqu’à la fin de la décennie. Ce chaos social et politique limite gravement la production du pays. Napoléon Bonaparte est instauré comme Premier Consul en 1799 et puis comme Empereur en 1804, Il mène une politique expansionniste, ce qui favorise l’industrialisation mais en même temps épuisent la production du pays. Les Guerres napoléoniennes qui terminent par la défaite et l’exile de l’empereur. La monarchie est restaurée en 1815 sous Louis XVIII. Intellectuel Il serait absurde de tenter ici de résumer toute l’activité scientifique et intellectuelle de l’époque. Il suffit de rappeler les apports du mercantiliste William Petty qui avait prôné la liberté commerciale et qui avait vu dans l’agriculture la vraie source de la richesse d’un pays. John Locke (1632-1704), un philosophe anglais, rédigeait des traités d’économie, comme Quelques considérations sur la baisse de l’intérêt et l’augmentation de la valeur de la monnaie (1691), mais il exerçait une influence particulière grâce à sa philosophie politique basée sur la liberté individuelle, élaborée dans Traité sur le gouvernement (1689). En France, l’effervescence intellectuelle est nette et tend à favoriser la liberté. Voltaire (1694-1778) rédige ses Lettres philosophiques (1734), Candide, ou l’Optimisme (1759), l’Eloge historique de la raison (1774). Jean-Jacques Rousseau (1712-1778), auteur de Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes (1755) et Le Contrat social (1762), met en avant l’importance du consentement des sujets pour la bonne gouvernance. Denis Diderot (1713-1784), soutenu par tant d’autres intellectuels, met en place l’Encyclopédie (1751-1772) qui rassemble toutes les connaissances humaines et les organisent. Auteurs En général, les économistes français du milieu du XVIIIème siècle sont connus par le nom « Physiocrates ». Ceux-ci cherchent à comprendre le fonctionnement global de l’économie (circuit économique), considèrent que la vraie source de la richesse d’un pays est dans l’agriculture. Ce n’est guère étonnant que l’industrie ne figure pas au centre de la réflexion économique des Physiocrates (comme c’est le cas chez Adam Smith et les autres classiques) compte tenu du fait de la nature foncièrement agricole de la France à cette époque. De plus, ils favorisaient le libre échange. Ils sont responsables de la phrase « laissez passer, paissez faire », ce qui devient le mot en anglais « laissez-faire economics » utilisé pour décrire l’école classique. L’un des premiers économistes qui développent ce type d’idée est Pierre Boisguilbert (1646-1714), bien qu’il ne soit pas considéré comme un véritable « physiocrate ». Dans son Traité sur la nature des richesses, de l'argent, et des tributs (1697-1707), il expose le principe que la richesse d’un pays provient principalement de l’agriculture et il est favorable à la libre concurrence. Surtout, il considère que l'économie doit répondre aux lois naturelles, sans pour autant expliquer quelles sont ces lois. Richard Cantillon (1680-1734), riche banquier parisien et auteur d’un Essai sur la nature du commerce en général, considère lui aussi que le travail de la terre est la seule vraie source de valeur. Il expose en outre un circuit économique en 3 phases (production, répartition, dépense) qui précède le circuit économique des Physiocrates à proprement parler. Le père du mouvement des Physiocrates était François Quesnay (1694-1774). Dans son ouvrage clé Tableau économique (1758) il considère que la source de la valeur se trouve dans le travail de la terre et il défendait le libre échange. Surtout il développe la notion d’un circuit économique divisé en trois classes. La classe productive consistait à des agriculteurs qui tiraient la richesse de la terre. La classe stérile comprenait toute personne impliquée dans la transformation de ces produits (artisans, marchands, etc.). Et la classe des propriétaires, qui louaient leurs terres. Les produits et l’argent passaient entre ces trois classes selon une formule très claire (voir texte). Les travaux de Quesnay constituent le fondement de l’école de physiocrates. L’autre grand physiocrate était aussi un homme d’Etat. Anne Robert Jacques Turgot (1727-1781) était l’auteur de Réflexions sur la formation et la distribution des richesses (1776). Dans cet ouvrage, il soutient les principes de Quesnay sur le libre échange et le circuit économique. Il modifie légèrement les trois classes économiques de Quesnay sans les dénaturer (voire les textes ci-dessous). En plus des idées typiques des physiocrates, il élabore une théorie des rendements décroissants qui sera repris et développer par Ricardo. Selon cette théorie, les rendements augmentent quand on ajoute de l’effort et capital, mais cette augmentation n’est pas toujours proportionnelle à l’investissement. L’amélioration des rendements est chaque fois plus petite, et après un certain seuil, l'addition d'effort ne se traduit par aucune augmentation de production. Turgot est devenu aussi Contrôleur général des finances sous Louis XVI en 1774. A ce poste, il tentait d’appliquer ses théories économiques à la réalité. En bon Physiocrate, il croyait que le commerce devait être libre. Il abolit les privilèges des corporations de métier et les péages. De plus, il a essayé de libéraliser le marché des grains et empêcher la fixation du prix du blé, une politique qui n’est pas passée sans résistance. La hausse du prix du pain a entraîné les plus grandes émeutes en France avant la Révolution Française. Certains philosophes ont rajouté à la réflexion économique des Physiocrates. Le Marquis de Mirabeau (1715-1789) dans son Traité sur la population (1756) reprend les idées des physiocrates, mais sous l'angle de la morale. Comme l'économie, la population obéit à des lois naturelles. Il existe chez l’homme deux faces. D’un côté, la cupidité des hommes les pousse à toujours augmenter leurs richesses et à améliorer leur train de vie, souvent au détriment des autres. Mais l’homme est aussi un être sociable, et c’est cette sociabilité qui l’amène à chercher le contacte avec les autres et à vivre en paix. Cette double face entraîne une augmentation de la population. Si cette théorie n’est pas la même que le principe de la population de Malthus, elle le devance d’une cinquantaine d’années. Surtout, ces deux aspects contradictoires de l’homme décrits par Mirabeau sont les mêmes dont Adam Smith parle dans ses deux ouvrages principaux. Une autre inspiration d’Adam Smith a pu être Pierre Paul Mercier de la Rivière (1719-1801). Dans L'ordre naturel et essentiel des sociétés politiques (1767), il décrit la recherche de l'intérêt personnel comme avantageux pour la société, contrairement à beaucoup de philosophes de l’époque, sous l’influence de Thomas Hobbes, qui voyaient les intérêts individuels des uns comme toujours en conflit avec ceux des autres. C’est précisément ce principe qui deviendra le principe clé du système économique de Smith. Certains philosophes de l’économie divergent parfois de l’orthodoxie physiocrate. Dans Le commerce et le gouvernement considérés relativement l'un à l'autre (1776), Etienne Condillac (1715-1780) soutient l’idée que le gouvernement doit laisser toute liberté aux échanges. Selon lui, toute intervention du gouvernement aura des effets négatifs. Mais contrairement aux autres physiocrates, il diminue l'importance de la terre dans la valeur. Pour Condillac, la valeur avait un fort composant psychologique, en plus de sa valeur objective. Les désirs sont différents chez les êtres humains et cette subjectivité constitue un mécanisme fondamental de l'économie. Enfin, il convient de citer Dupont de Nemours (1739-1817). Cet homme d'Etat était l’éditeur des principaux ouvrages des Physiocrates, en particulier Physiocratie (1767) qui rassemble les principaux écrits de Quesnay. Sans le soutien des grands hommes, et la diffusion qu’il permet, les idées des intellectuels n’auraient jamais de portée et peuvent demeurer sans influence. Questions de réflexion (Les réponses sont à chercher dans le texte ci-dessus)
Les Physiocrates sont les premiers qui cherchent à comprendre le fonctionnement global de l’économie, par le biais du « circuit économique ». Mais c’était Adam Smith, dans la Richesse des Nations, qui réussit à expliquer ce fonctionnement grâce à un principe très simple, la recherche de l’intérêt propre, tout comme Newton avait expliqué comment fonctionne l’univers physique grâce à la loi de la gravitation universelle.
Documents Pierre Boisguilbert et la valeur 1. La Suède et le Danemark, unis ensemble comme ils étaient il y a 150 ans, sont beaucoup plus étendus que ne l’est la France ; cependant le produit, tant à l’égard du prince que des peuples, ne va pas à la dixième partie de celui de la France. 2. La raison de cette différence est que le terroir de la France est excellent pour produire les denrées nécessaires à la vie, et que celui du Danemark et de la Suède ne vaut rien du tout. 3. Quelque bonne que soit une terre, quand elle n’est pas cultivée, elle est la même à l’égard du propriétaire et du prince que si elle ne valait rien du tout. 4. C’est un fait qui ne peut être contesté, que plus de la moitié de la France est en friche ou mal cultivée, c’est-à-dire beaucoup moins qu’elle ne le pourrait être, et même qu’elle n’était autrefois, ce qui est encore plus ruineux que si le terroir était entièrement abandonnée, parce que le produit ne peut répondre aux frais de la culture. […] 11. Tout consiste donc à trouver la cause de cet abandonnement, pour pouvoir en 24 heures rendre le Roi et ses peuples très riches. 12. Il ne peut y avoir que deux causes qui empêchent un homme de cultiver sa terre, ou parce qu’il faut une certaine opulence qu’il n’est point en état de se procurer, ni par lui-même ni par emprunt, ou parce qu’après l’avoir cultivée, il ne pourrait pas avoir le débit de sa production comme il faisait autrefois, ce qui lui ferait perdre toutes ses avances et qui le jette dans le malheureux intérêt de laisser son bien en friche. […] 20. Ainsi, tout dépend de la culture de la terre qui ne peut croître tant que l’on ôte le pouvoir aux laboureurs de faire les avances pour les cultures et de garder bénéfices des denrées qui en résultent. Les physiocrates et les classes sociales 1. Quesnay La nation est réduite à trois classes de citoyens : la classe productive, la classe de propriétaires et la class stérile. La classe productive est celle qui fait renaître par la culture du territoire les richesses annuelles de la nation, qui fait les avances des dépenses des travaux de l’agriculture, et qui paie annuellement les revenus des propriétaires des terres. On renferme dans la dépendance de cette classe tous les travaux et toutes les dépenses qui s’y font jusqu’à la vente des productions à la première main ; c’est par cette vente qu’on connaît la valeur de la reproduction annuelle des richesses de la nation. La classe des propriétaires comprend le souverain, les possesseurs des terres et les décimateurs. Cette classe subsiste par le revenu ou produit net de la culture qui lui est payé annuellement par la classe productive, après que celle-ci a prélevé, sur la reproduction qu’elle fait renaître annuellement, les richesses nécessaires pour se rembourser de ses avances annuelles et pour entretenir ses richesses d’exploitation. La classe stérile est formée de tous les citoyens occupés à d’autres services et à d’autre travaux que ceux de l’agriculture, et dont les dépenses sont payées par la classe productive et par la classe des propriétaires, qui eux-mêmes tirent leurs revenus de la classe productive. […] Le tableau économique renferme les trois classes et leurs richesses annuelles et décrit leur commerce dans la forme qui suit :
François Quesnay, Tableau économique (1758). Analyse de la formule arithmétique du tableau économique de la distribution des dépenses annuelles d’une nation, in François Quesnay et la physiocratie, Paris, 1958, pp. 793-95, 801. |
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