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I / Le sort de la théorie du délit unique et de ses corollaires sous l’empire du nouveau Code pénal On peut considérer que complice et auteur principal restent « cousus dans le même sac » en ce que l’acte du complice ne revêt toujours pas de criminalité propre et qu’il est toujours analysé par référence à un fait principal, qui doit être punissable pour permettre la répression du complice (A). Néanmoins cette « couture » si stricte avec le Code pénal de 1810 tend à s’effilocher depuis la réforme de 1994 puisque pénalité du complice et de l’auteur principal sont désormais autonomes (B). A / Le maintien du système de la criminalité d’emprunt La criminalité d’emprunt signifie qu’on ne peut condamner le complice que s’il existe un fait principal punissable. Le maintien de la règle de l’emprunt de criminalité ne fait pas de doute. La repression de la complicité suppose donc toujours l’existance d’une infraction principale11. En effet, même si l’Art. 121-6 CPén n’exige pas expressément l’existence d’un fait principal punissable, certains indices permettent néanmoins de déduire que la réforme du Code pénal a préservé cette condition nécessaire à la répression du complice. L’Art. 121-6 parle de « complice de l’infraction ». Il impose donc, préalablement à la répression du complice, qu’une infraction soit effectivement constituée. De la même façon, l’Art. 121-7 évoque « le complice d’un crime ou d’un délit » concernant la complicité par aide ou assistance, et « la personne qui aura provoqué à une infraction ou donné des instructions pour la commettre » pour la complicité par provocation et instructions. Cela signifie que seule compte l’existence d’un fait principal punissable : peu importe, donc, qu’il y ait ou non un auteur principal effectivement puni ou même simplement punissable. Dès lors que la cause d’impunité est personnelle à l’auteur, elle n’efface pas le caractère délictueux de l’acte. Trois conséquences en découlent alors : Tout d’abord, un acte principal non constitutif d’une infraction ne permet aucune répression du complice. Ce cas correspond à différentes hypothèses :
La complicité est toujours un délit intentionnel. Donc on en déduit l’impunité de l’auxiliaire qui a ignoré à quoi servirait le service rendu à l’auteur principal, même si l’auteur principal est poursuivi pour un délit non intentionnel. Par contre lorsqu’un concours a été fourni pour une infraction et sert à une autre on distingue, il faut distinguer selon que l’auteur principal a commis ou non une infraction du même type que celle prévue par l’auxiliaire. Ainsi si l’erreur dont est victime le complice porte sur l’intérêt protégé auquel l’auteur principal porte atteinte, le complice est exonéré. Au contraire, il succombe à la poursuite si son erreur concerne l’agissement de l’auteur principal. Ensuite, tout acte punissable rend possible la répression du complice, que l’auteur soit, ou non, punissable. En effet une cause d’impunité personnelle à l’auteur principal n’affecte pas le caractère délictueux de l’acte lui-même. Ainsi lorsqu’on ne peut poursuivre l’auteur principal en raison d’une impossibilité matérielle (parce qu’il est décédé, en fuite ou inconnu), ou d’une raison juridique strictement personnelle à celui-ci, le complice reste quant à lui punissable. Enfin une question se pose quant aux causes assurant l’impunité à l’auteur principal : quid, en ce cas, du complice ? Sous l’empire de l’ancienne législation (Art. 380 de l’ancien Code pénal), l’immunité familiale était au nombre des causes qui commandaient l’impunité du complice, qu’il s’agisse du complice non parent de la victime, d’un auteur quant à lui parent, ou du complice parent d’un auteur non parent. Depuis la réforme de 1994, certains auteurs dont Stéphanie Fournier, considèrent désormais que l’immunité familiale prévue par l’Art. 311-12 du nouveau Code pénal, n’affecte pas l’acte commis mais constitue une cause d’impunité personnelle à celui qui a une relation de parenté ou un rapport de mariage avec la victime. En effet l’immunité familiale ne supprime pas le caractère illicite de l’acte : elle constitue un obstacle aux poursuites15. Elle ne toucherait pas l’acte et le sort du complice serait alors le même que celui d’un coauteur. La règle de la criminalité d’emprunt ne permettrait donc plus de faire échapper à la répression le complice non parent de la victime, parce qu’il emprunterait sa criminalité à un fait principal non punissable puisque couvert par l’immunité familiale. En revanche, le complice parent de la victime, d’un auteur non parent, serait quant à lui couvert par l’immunité familiale. Qu’en est-il des faits justificatifs ? Les articles 64, 327 et 328 du Code pénal de 1810 disposaient qu’en présence d’un fait justificatif, « il n’y a ni crime ni délit ». Ils affectaient donc l’acte pour lui ôter son caractère délictueux. Désormais, les articles 122-1 et suivants considèrent qu’en cas de faits justificatifs, la personne « n’est pas pénalement responsable ». Aujourd’hui l’acte demeure donc pénalement qualifiable et c’est la personne qui n’est pas punissable. Le complice ne peut donc plus bénéficier des faits justificatifs du comportement de l’auteur principal. Le nouveau Code pénal a donc maintenu la solution antérieure qui consistait à subordonner la répression du complice à l’existence d’un fait principal punissable, en vertu du principe de criminalité d’emprunt. Il a en revanche distendu le lien unissant le complice à l’auteur en ce qui concerne la pénalité qui leur est applicable. B / L’abandon de la pénalité d’emprunt L’Art. 121-6, en prévoyant que le complice sera puni « comme auteur », marque la fin du système de l’emprunt de pénalité. En effet, il ne s’agit plus, désormais, de se référer à la peine encourue par l’auteur, mais à celle encourue par le complice, s’il avait été auteur. Ainsi, on écarte le risque de faire encourir au complice une peine qui par nature ne pourrait lui être appliquée (ex. : lorsque l’auteur principal est une personne morale). Mais en vertu de l’adage specialia generalibus derogant, lorsque les textes prévoient une peine distincte pour le complice, il s’agit de lui appliquer cette peine spéciale, contrairement aux règles générales16. Face à la distension du lien unissant le complice et l’auteur principal, différentes questions se posent. 1°) A quelle qualification faut-il se référer pour déterminer la peine applicable au complice ? Au vu de la lettre de l’Art. 121-6 CPén, il ne semble pas que soit exigée une qualification identique pour l’acte de l’auteur principal et l’acte de complicité. En effet, le texte ne comporte pas d’obstacle de principe à ce que le complice encourt une peine attachée à une qualification différente de celle applicable à l’acte de l’auteur principal. Prenons l’exemple d’un homme qui apercevant son ennemi juré derrière un fourré, décide un chasseur à tirer sur lui en lui faisant croire qu’il s’agit d’un animal. Le chasseur auteur principal encourrait la peine de l’homicide involontaire, tandis que le complice pourrait se voir condamner pour meurtre. C’est toujours l’acte de l’auteur principal qui sert donc de référence pour déterminer la peine applicable au complice, mais l’acte de complicité ne lui emprunte ni la qualification, ni la peine. Cette référence à l’infraction principale pour déterminer la peine encourue par le complice peut néanmoins poser problème. Peut-on punir comme auteur, la personne complice d’une infraction qu’elle ne pouvait juridiquement pas commettre elle-même en tant qu’auteur principal, parce que cette infraction suppose chez l’auteur une qualité particulière que ne revêt pas le complice? Ainsi en est-il de certaines infractions qui ne peuvent être commises que par un fonctionnaire, telles que la concussion17 (Art. 432-10) ou la prise illégale d’intérêts18 (Art. 432-12 et 432-13). Est-ce à dire que le complice non dépositaire de l’autorité publique ou chargé d’une mission de service public, ne peut être poursuivi ? Or certains auteurs étaient contre : d’une part si la qualité personnelle constitue une circonstance aggravante, la personne revêtue de cette qualité méconnaît en plus de l’atteinte à un intérêt protégé un devoir supplémentaire attaché à son état, l’auxiliaire étranger à ces devoirs ne mérite pas le surcroît de sévérité encouru par l’auteur principal ; d’autre part, si la qualité visée par la loi pénale est nécessaire à la réalisation de l’infraction, l’intérêt protégé est placé sous la seule sauvegarde des personnes revêtues de cette qualité, les autres citoyens n’ayant pas à s’en soucier. Certains auteurs se refusent à une telle impunité et considèrent qu’en réprimant le complice comme auteur, le législateur a nécessairement supposé que le complice pourrait être, au moins d’un point de vue théorique, l’auteur de l’infraction considérée. Ils se portent donc en faveur de l’ancienne jurisprudence de la Cour de cassation qui avait déclaré ne faire aucune exception au caractère général de la complicité : « la circonstance que la qualité personnelle de l’auteur de l’infraction est un élément constitutif et nécessaire de celle-ci n’exclut en rien la complicité des tiers »19. De la même façon, la Cour de cassation a récemment admis que « sont applicables au complice les circonstances aggravantes liées à la qualité de l’auteur principal », et a fait subir au complice d’un faux en écriture authentique commis par un notaire, l’aggravation tenant à la qualité d’agent chargé d’une mission de service public agissant dans le cadre de ses fonctions encourue par l’auteur principal20, alors que ce complice ne revêtait pas personnellement cette qualité. 2°) Quelles sont les causes d’impunité, d’exemption, de diminution et d’aggravation de peine susceptibles de se communiquer au complice ? Sous l’empire de l’ancien code pénal, on distinguait différentes circonstances. Les circonstances réelles (ou objectives) touchaient la criminalité de l’acte, quelle que soit la personnalité de celui qui l’avait commis. Ses effets s’étendaient donc aux complices. Les circonstances personnelles (ou subjectives) venaient intensifier ou amoindrir la culpabilité de celui qui avait agi. Elles s’appréciaient donc distinctement en la personne de l’auteur et du complice. Les circonstances mixtes tenaient à la fois à la personne et à l’acte, si bien que présentes chez l’auteur elles se répercutaient sur le complice, tandis que présentes chez le complice, elles n’avaient d’incidence ni sur l’auteur ni sur le complice. Les circonstances réelles et personnelles n’ont subi aucun changement avec l’entrée en vigueur du nouveau Code pénal. Ainsi les circonstances objectives, tenant à l’acte principal se répercutent toujours sur le complice, et celui-ci pourra voir sa peine aggravée par des circonstances qui lui sont personnelles et qui ne concernent pas l’auteur principal. En revanche les circonstances liées à la personne de l’auteur principal n’aggravent pas la peine encourue par le complice. La bande organisée constitue une circonstance réelle, ou objective, tout comme l’aggravation tenant au résultat de l’infraction (ex. : ITT inférieure ou supérieure à 8 jours) ou celle tenant à la personne de la victime (ex. : mineur de 15 ans, particulière vulnérabilité, qualité de magistrat etc.). Mais une circonstance réelle peut aussi entraîner une exemption de peine ; c’est le cas de la démence ou des faits justificatifs qui supprimaient le caractère illicite de l’acte principal. Il semble néanmoins que les faits justificatifs soient devenus des circonstances personnelles à l’auteur, depuis que les nouveaux Art. 122-1 et suivants disposent qu’en présence de tels faits la personne « n’est pas pénalement responsable ». Les circonstances personnelles peuvent donner lieu à une diminution ou une exemption de peine, comme l’état de minorité de l’auteur ou l’existence d’un trouble au moment de l’acte ayant affecté le discernement. Elles peuvent également, comme la récidive, faire encourir une peine aggravée. Quid toutefois des circonstances mixtes ? Certains auteurs considèrent que leur intérêt a disparu aujourd’hui en raison, selon eux, d’un abandon de la criminalité d’emprunt21. L’acte du complice aurait donc sa propre criminalité et lui-même sa propre culpabilité. Selon la doctrine majoritaire, les circonstances mixtes doivent exclusivement s’apprécier dans la personne du complice, puisqu’il est désormais « puni comme auteur ». Il n’y aurait donc plus d’utilité, si ce n’est une utilité purement didactique, à distinguer les circonstances mixtes des circonstances personnelles. D’autres auteurs préconisent cependant d’appliquer au complice ces circonstances, tant lorsqu’elles sont présentes en sa personne que lorsque les conditions en sont réunies dans la personne de l’auteur. En effet, les circonstances mixtes tiennent à la fois à l’acte et à la personne. En ce qu’elles tiennent à l’acte, elles doivent s’appliquer au complice, puni comme auteur, même lorsqu’elles proviennent de l’auteur principal. En ce qu’elles tiennent à la personne, elles doivent s’appliquer au complice qui en réunit les conditions en sa personne. Traditionnellement, les circonstances mixtes sont toutes les circonstances qui ont trait aux mobiles, à l’habitude et à la préméditation. Certains auteurs, cependant, considèrent la préméditation comme une circonstance personnelle22. Le classement de certaines autres circonstances fait quant à lui difficulté. Si dans un premier temps on peut être tenté de considérer la qualité de l’agent comme une circonstance personnelle (ex. : personne dépositaire de l’autorité publique), il faut admettre qu’elle constitue plutôt une circonstance mixte. En effet, ce qui fait encourir l’aggravation de la peine à l’agent n’est pas tant cette qualité que le fait que la circonstance a été commise par une telle personne « agissant dans l’exercice de ses fonctions » ou « à l’occasion de ses fonctions ». Elle tient donc à la personne et à l’acte, dont elle constitue une modalité de réalisation. La circonstance d’une relation particulière unissant l’agent à la victime pose également problème. Certains auteurs proposent de rechercher la raison de l’aggravation pour déterminer sa nature. L’atteinte à la vie, quand il s’agit de la vie d’un père, est-elle aggravée parce que l’agent est davantage punissable que s’il s’agissait d’un tiers, ou parce que l’acte est en outre objectivement plus grave ? On pourrait plutôt pencher pour la première solution et opter pour la nature de circonstance personnelle. En abandonnant la règle de la pénalité d’emprunt, le législateur s’est ainsi départi d’une des principales critiques attachées au système absolu du délit unique. En effet, la substitution de l’Art. 121-6 à l’ancien Art. 59 a permis une meilleure individualisation de la peine applicable au complice en ne lui faisant plus subir des circonstances aggravantes auxquelles il était étranger. Ce faisant, il n’est pas parvenu pour autant à rompre avec l’ensemble des critiques traditionnelles attachées à la théorie de l’emprunt de criminalité ; c’est pourquoi la question du maintien des atténuations élaborées sous l’empire de l’ancien Code pénal demeure, afin de permettre une répression du complice même lorsque celui-ci y échappe en vertu des règles générales de la complicité. |
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