Universite aix marseille III – paul cezanne





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Section 1. Des sources juridiques diversifiées



De multiples distinctions peuvent être opérées entre des instruments juridiques qui relèvent chacun d’un domaine particulier et qui traitent le plus souvent de manière accessoire de la thématique des aires marines protégées. Ce corpus juridique hétéroclite rassemble à la fois des outils conventionnels forts peu contraignants et des plans d’action dynamiques, des instruments à vocation universelle et d’autres très limités dans leur champ d’application géographique, des outils spécifiques au milieu marin avec d’autres élaborés dans une optique résolument continentale… Au final, le seul lien qui unit ses divers instruments internationaux est de fournir un cadre juridique d’incitation ou d’obligation à la création d’aires marines protégées. Etant donnée l’importante diversité de ces normes juridiques, il convient préalablement de rappeler les conditions qui ont précédé ou motivé leur adoption (§ 1) et de mesurer leur portée sur les espaces maritimes méditerranéens à travers leurs champ d’application respectif (§ 2).

§ 1. La naissance progressive d’un droit relatif à la conservation de la biodiversité marine en Méditerranée
Afin de situer ces instruments les uns par rapport aux autres, la distinction en fonction de leur force contraignante a été privilégiée. Seule celle-ci permet en effet de fournir une cohérence d’ensemble dans un domaine où les règles coutumières sont quasi absentes. Elle reste toutefois de portée limitée au regard de la faible force contraignante des conventions pertinentes et du dynamisme de nombreux instruments non contraignants relevant du champ de la conservation de la biodiversité marine. Une autre approche consiste à différencier ces instruments en fonction de leur champ d’application géographique potentiel. Celui de certains d’entre eux est en effet potentiellement très large – l’ensemble de la planète – tandis que pour d’autres, il se réduit à un espace géographique défini qui peut se limiter à une sous région méditerranéenne. Enfin, une dernière approche consiste à différencier les instruments en fonction de leur objet thématique : tandis que certains visent à conserver l’ensemble de la biodiversité marine, d’autres se limitent à des espèces ou des espaces particuliers. Par souci de cohérence, nous utiliserons les distinctions les plus pertinentes au cours de cette présentation synthétique des instruments juridiques internationaux et communautaires, en commençant par l’approche classique qui consiste à les différencier en fonction de leur force contraignante.


    1. Les instruments contraignants


Deux types d’instruments juridiques internationaux disposent d’une force contraignante à l’égard des Etats qui en sont Parties : les conventions internationales, et la législation communautaire, au champ d’application plus restreint.


      1. Le droit international de l’environnement 


Evoquer les conventions applicables en Méditerranée permet d’appréhender l’évolution d’un droit international de la conservation de la nature qui s’est progressivement diversifié, tant en fonction de l’objet matériel de la protection que de son champ d’application géographique potentiel. Un nombre important d’instruments conventionnels applicables en Méditerranée font référence à la protection des habitats côtiers et marins, évoquant plus ou moins directement les aires marines protégées. Il convient de noter au préalable qu’aucune convention mondiale ne traite des aires marines protégées, d’où l’importance d’une démarche régionale en la matière qui permet également de renforcer la précision et la finesse des mesures adoptées.
De nombreuses conventions au champ d’application potentiellement universel visent à protéger la biodiversité marine. La plus importante d’entre elles demeure la Convention sur la diversité biologique (CDB), proposée à la signature le 5 juin 1993, qui constitue l’assise juridique pour la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité. Elle est la première convention à vocation universelle ayant pour objectif la conservation des caractéristiques essentielles de la biosphère (*) et le partage équitable de ses composantes. Malgré les déceptions que cette convention suscita au regard du projet initialement élaboré1, elle sera largement signée et ratifiée par les Etats, assurant en entrée en vigueur rapide, dès le 29 décembre 1993.
D’une portée plus limitée car restreinte dans son champ d’application aux seuls espaces maritimes, la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer (CNUDM) constitue également un élément central pour la conservation du milieu marin. Pourtant, cette convention compte peu d’Etats parties et a mis un certain temps à entrer en vigueur, en raison de l’absence de consensus sur certaines règles qu’elle codifie. Cette relative difficulté à s’affirmer s’explique essentiellement par les conditions qui ont précédées son adoption. Son élaboration résulte d’un long processus de codification du droit de la mer, initié en 1958 par la première Conférence des Nations Unies sur le droit de la mer (Genève) qui avait aboutie alors à l’adoption de quatre conventions1. Loin de régler les problèmes liés à l’extension progressive des zones de souveraineté territoriale, ces textes ne satisfirent pas une communauté internationale en pleine évolution – accroissement du nombre des Etats – qui reconnu dans les années 1970 le principe d’une troisième conférence internationale sur le droit de la mer2. L’adoption d’une nouvelle convention souleva d’énormes difficultés et il fallut attendre 8 années et 11 sessions pour qu’un texte d’une longueur3 et d’une complexité rare soit approuvé le 30 avril 1982 à New York par 130 voix contre quatre4. Le 10 décembre 1982, la CNUDM fut enfin signée par 124 Etats à Montego Bay, en Jamaïque. Elle entrera en vigueur le 16 décembre 1994, soit douze ans après sa signature. Ce texte intègre les questions relatives à la protection de l’environnement marin en raison d’évènements tels que le naufrage de l’Amoco Cadiz en 1978 qui pesèrent largement sur les débats.
Au-delà de ces deux traités fondamentaux qui fixent le cadre juridique de la conservation de la biodiversité marine et côtière, d’autres conventions plus sectorielles concernent également, le plus souvent partiellement, la thématique des aires marines protégées.
La Convention relative à la protection du Patrimoine mondial, culturel et naturel a bénéficié d’un consensus rare en droit international5. Elle affirme la nécessité de protéger, sous la responsabilité des Etats, les sites naturels et les éléments culturels exceptionnels. Signée sous l’égide de l’UNESCO à Paris le 23 novembre 1972, elle est entrée rapidement en vigueur dès le 17 décembre 1975. Sa principale originalité réside dans le fait de réunir dans un même instrument international les éléments culturels et naturels, partant de l’idée que nature et culture sont complémentaires et que l’identité culturelle est profondément liée à l’environnement naturel dans lequel elle se développe.
La Convention de Ramsar relative à la conservation des zones humides internationales comme habitats des oiseaux d’eau est quant à elle l’une des premières à avoir évoqué la création d’un réseau d’aires protégées à l’échelle globale. Signée à Ramsar (Iran) le 2 février 1971, elle vise à conserver les « zones humides d’importance internationale » situées sur le territoire national des Etats Parties6. Un prolongement accessoire en milieu marin est possible dans les limites fixées par la Convention. La Convention a été amendée par le Protocole de Paris en 1982 et les amendements de Regina en 1987.
Enfin, la Convention sur la conservation des espèces migratrices appartenant à la faune sauvage1 établit aussi un système juridique original. Fruit de la Conférence des Nations Unies sur l’Environnement de Stockholm2, elle s’articule autour d’une « Convention mère » ou « Convention parapluie » qui fixe les principes généraux et établit le cadre institutionnel : Conférence des Parties, Conseil scientifique, Secrétariat. Le « système de Bonn » conduit ainsi à multiplier les instruments juridiques tout en gardant une certaine cohérence entre eux. L’objectif est d’aboutir à des instruments spécifiques à chaque groupe d’espèces dans leur aire de répartition géographique de manière à « coller » au plus près à la réalité écologique, tout en conservant une unité générale : « cette double nécessité impose l’institution de systèmes arborescents pyramidaux, comme l’est ‘le système de Bonn’ »3
La Convention comporte deux annexes. La première vise les espèces migratrices en danger (annexe I) qui doivent faire l’objet d’une protection immédiate4. La seconde énumère les espèces migratrices devant faire l’objet d’accords (annexe II). C’est sur la base de celle-ci que sont conclus les accords spécifiques5.
Contrairement au système de convention cadre et de protocoles additionnels qui aura prévalu dans le cadre de la Convention de Barcelone, les accords restent des instruments tout à fait distincts sur le plan juridique. La Convention assure toutefois la cohérence par le biais des annexes et de l’article V qui établit des « lignes directrices relatives à la conclusions d’accords ».
Accord spécifique de la Convention de Bonn au sens de l’article IV al.4, l’Accord ACCOBAMS est dédié à la conservation des cétacés de la Mer Noire, de la Méditerranée et de la zone Atlantique adjacente1. Il a été signé le 24 novembre 1996 par 11 Etats de « l’aire de répartition » 2, et est entré en vigueur le 1er juin 2001.
Egalement Accord régional au sens de la Convention de Bonn, l’Accord de La Haye est le fruit d’une longue évolution du droit de la conservation des oiseaux sauvages3. Cet accord est en effet le premier à couvrir tout un groupe d’espèces d’oiseaux d’eau migrateurs4 sur une zone géographique immense – équivalente à « l’aire de répartition » des espèces concernées – qui représente 40% de la surface du globe5. En couvrant l’Europe, l’Afrique et l’Asie mineure, il intéresse potentiellement l’ensemble du bassin méditerranéen, importante aire de migration des oiseaux.
Chacun de ces deux accords comprend un plan d’action ayant valeur contraignante pour les Etats Parties. Aucun de ces plans d’action n’est aujourd’hui entré en vigueur.
Cette approche régionale de la conservation de la biodiversité a également prévalue pour la conservation du milieu marin à travers le développement des conventions pour les mers régionales. C’est face à l’ampleur des menaces et des enjeux liés à la sauvegarde de la mer Méditerranée que le PNUE, créé en 1972 à la suite de la Conférence de Stockholm, décidera de lui consacrer le premier plan d’action élaboré dans le cadre du Programme des mers régionales6. Ce programme mondial marque la volonté du PNUE d’adopter une approche régionale pour traiter l’un des six domaines d’action qu’il définit comme prioritaires : les océans. Cette approche vise à atteindre des objectifs généraux tels que la prévention et la lutte contre les pollutions, l’amélioration de la qualité du milieu marin et l’établissement de zones protégées. Elle repose sur l’idée d’une unité naturelle, culturelle et sociale des différents milieux, considérant l’élément liquide comme un trait d’union entre les Etats riverains plutôt que comme une frontière infranchissable. Il se révèle en effet que les mers régionales ont toujours constitué des facilitateurs de communication à l’origine d’une identité spécifique7. Le concept de mer régionale ne répond donc pas à une réalité juridique, mais bien à une réalité géographique. D’une façon générale, les conventions régionales apportent un niveau de protection plus élevé8. Elles permettent de favoriser la coopération des Etats qui s’avère particulièrement importante dans le domaine de l’environnement. Mme Dejeant-Pons souligne ainsi que le régionalisme est « le meilleur moyen de gérer rationnellement un espace déterminé, tel que le sont les mers régionales »1.
Le Plan d’Action pour la Méditerranée (PAM), adopté le 4 février 1975 au terme de la première Réunion des Etats méditerranéens (Barcelone, 28 janvier – 4 février 1975) comprenait quatre volets : socio-économique2, scientifique3, juridique4 et institutionnel5. La dimension juridique prévoyait l’élaboration d’un projet de texte destiné à fixer les principes de la coopération en matière de lutte contre la pollution en Méditerranée. A l’issue de réunions d’experts6 et de discussions entre les Etats, le texte définitif fut adopté à Barcelone le 16 février 1976 par 12 Etats méditerranéens7. La Convention entrera rapidement en vigueur, le 12 janvier 1978. Le Système de Barcelone repose sur un système juridique original : il s’agissait pour la première fois d’agir à l’échelle d’une écorégion marine au sein de laquelle se côtoyaient des Etats au niveau de développement inégaux : il fallait prendre en compte ces disparités avant même l’invention du principe des responsabilités différenciées. C’est pourtant ce qui caractérise le système établi en 1976 qui fonctionne selon un double niveau :


  • Une Convention cadre qui pose les obligations minimales et les grands principes ;

  • Des protocoles additionnels qui contiennent les dispositions techniques et qui s’avèrent beaucoup plus contraignants que l’accord-cadre. Ils sont ouverts à la signature des Etats Parties à la Convention.


L’avantage de ce système réside essentiellement dans le fait qu’il a permis au plus grand nombre d’Etats méditerranéens d’entrer dès sa création dans le processus juridique, et de compléter progressivement les obligations techniques contenues dans les Protocoles8. Ainsi, même la Libye, généralement à l’écart des instruments internationaux est Partie à la Convention. De même, les Territoires palestiniens bénéficient du statut de membre associé aux travaux du PAM. Le système est verrouillé par l’article 23 qui prévoit l’obligation pour chaque Etat Partie d’adhérer à au moins un protocole, de même que tous les signataires d’un protocole doivent être Parties à la Convention.
Ainsi, beaucoup d’auteurs ont vu dans la Convention de Barcelone une action novatrice en matière de développement durable : « Avec quelques quinze années d’avance sur la Conférence de Rio, l’expérience méditerranéenne s’affiche comme un premier cas de coopération associant étroitement la protection de l’environnement à l’action de développement dans une vision globale et intégrée des enjeux auxquels les Etats riverains sont confrontés. »1
La Convention ne contient que de vagues obligations d’objectifs centrées autour de la thématique de la lutte contre la pollution2. Ces obligations non contractuelles traduisent néanmoins une volonté commune des Etats riverains qui se concrétise juridiquement dans les règles techniques contenues dans les protocoles et leurs annexes3. Or, le principe qui préside à l’adoption de ces protocoles est celui de la concertation, ce qui fait du système de Barcelone un instrument de discussion au sein duquel chaque Partie est amenée à faire les compromis qu’elle juge acceptables. On peut voir ici un certain « pragmatisme » du droit international, qui fut également souligné par les sénateurs français : « Il [le Système de Barcelone] fait montre d’un certain pragmatisme qui, compte tenu de la disparité des niveaux de développement entre les pays méditerranéens, s’avère sans doute plus pertinent qu’un cadre trop rigoureux. »4
Ces protocoles sont maintenant au nombre de six, chacun s’inscrivant dans une thématique particulière, étendant progressivement le champ de la Convention initialement limité à la lutte contre les pollutions5. Ce n’est deux ans plus tard qu’apparaît la thématique de la biodiversité, bien qu’elle ne fasse l’objet d’aucune disposition spécifique dans le cadre de la Convention1. En 1982 est donc adopté à Genève le Protocole relatif au aires spécialement protégées en Méditerranée. Son adoption a été un évènement important de l’évolution du droit international de l’environnement. Comme le soulignait C. de Klemm, il fut « le tout premier traité à porter sur la conservation d’espaces naturels à l’intérieur d’une région marine constituant une unité écologique » 2. Cependant, son champ d’application se limitait aux eaux territoriales des Etats et ne permettait pas de prendre en considération l’ensemble de la diversité biologique, conformément aux orientations de la CNUED de Rio (1992). L’adoption d’un nouveau Protocole sur le thème de la diversité biologique fut un des éléments qui nécessita une révision de la Convention de Barcelone3.
Deux notions essentielles apparaissent au cours de cette révision, témoignant des acquis de la CNUED de Rio4 : l’objectif de la Convention est dorénavant élargi au « développement durable », induisant la reconnaissance de nouveaux principe : le principe de précaution (article 4§3 a), le principe pollueur payeur (article 4§3 c), l’obligation de réaliser des études d’impact sur l’environnement (article 4§3 c) et le principe d’information et de participation du public (article 11 b). La notion de « biodiversité » apparaît également, assortie d’une nouvelle obligation pour les Parties contractantes de prendre, individuellement ou conjointement, « toutes les mesures appropriées pour protéger et préserver la diversité biologique, les écosystèmes rares et fragiles aussi bien que les espèces de la faune et de la flore sauvages qui sont rares, épuisées, menacées ou en danger, et leurs habitats, dans la zone à laquelle s’applique la Convention. »1 C’est en vertu de celle-ci qu’est adopté un nouveau Protocole relatif aux aires spécialement protégées et à la diversité biologique en Méditerranée à Barcelone le 10 juin 1995. Il entrera en vigueur le 12 décembre 1999.
Il convient de mentionner également l’existence de conventions de protection de l’environnement marin limitées dans leur objet à une sous région méditerranéenne. L’accord de Rome relatif à la création d’un Sanctuaire pour les mammifères marins en mer de Ligure est une émanation directe du Protocole de Barcelone. Signé le 25 novembre 1999 par la France, l’Italie et Monaco, il est entré en vigueur le 21 février 2002. C’est encore le seul accord sous-régional à concerner directement la thématique des aires marines protégées en Méditerranée.
La Méditerranée, lieu de rencontre entre l’Afrique et l’Europe est également en partie concernée par les conventions de protection de l’environnement élaborées dans un contexte régional continental. La première de ces conventions, à l’origine du droit international de l’environnement fut adoptée par les puissances coloniales en Afrique dès 1900 afin « d’empêcher le massacre sans contrôle et d’assurer la conservation des diverses espèces animales vivant à l’état sauvage… qui sont utiles à l’homme ou inoffensives »2. Ce Traité jamais ratifié sera suivi en 1933 d’une convention semblable qui constituera le principal appui juridique à la création des premiers parcs nationaux de faune sauvage en Afrique australe et équatoriale3. La portée de cette convention était limitée en raison du fait que l’Afrique du début du siècle restait plus objet qu’acteur du droit international. L’émergence progressive d’Etats indépendants a rendu caduque sa portée juridique.
Aussi, la Convention africaine sur la conservation de la Nature et des Ressources Naturelles, signée à Alger le 15 septembre 1968 au cours du 5ème sommet de l’Organisation panafricaine, (entrée en vigueur le 9 octobre 1969) a marqué une étape importante du droit international de l’environnement à une époque où les conventions généralistes sur la protection de la nature étaient quasiment inexistantes4. Préparée techniquement par l’UICN, cette Convention est le seul instrument généraliste de protection de la nature et des ressources naturelles en Afrique. Bien que largement innovante sur les plans techniques et juridiques dans les années 1960, elle souffre aujourd’hui de faiblesses financières et institutionnelles. C’est la raison pour laquelle l’idée d’une révision longuement évoquée s’est concrétisée en juillet 2003 par l’adoption d’un nouveau texte1. Cette Convention reste cependant assez marginale en ce qui concerne la protection du milieu marin méditerranéen, les Etats d’Afrique du nord préférant agir dans le cadre de la Convention de Barcelone ou même à travers celui de la Convention de Berne relative à la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel en Europe.
Cette dernière convention, adoptée dans un cadre paneuropéen, établit un cadre juridique rigoureux de protection, renforcé par un dispositif institutionnel parmi les plus actifs dans le domaine de l’environnement. C’est à la suite de la Conférence de Stockholm (1972) et de la Conférence ministérielle européenne sur l’environnement (Vienne, 28-30 mars 1973), que l’Assemblée consultative du Conseil de l’Europe émit une recommandation au Conseil des Ministres visant à « définir une politique cohérente de protection de la vie sauvage avec en vue l’établissement de régulations européennes (…) » 2. En 1976, le Conseil des Ministres charge un Comité ad hoc de l’élaboration d’un projet de convention sur la conservation de la vie sauvage. Ce projet fut adopté le 18 juin 1979 et ouvert à la signature à l’occasion de la troisième Conférence ministérielle européenne sur l’environnement qui s’est tenue à Berne le 19 septembre 1979. La Convention ainsi adoptée entrera rapidement en vigueur, le 1er juin 1982.
Présentés brièvement, ces instruments conventionnels forment un corpus juridique hétéroclite, composé d’instruments à portée potentielle variable. Les plus récents d’entre eux cherchent à coller au plus près de la réalité biologique. C’était déjà l’esprit du Conseil de l’Europe qui a cherché progressivement, à l’échelle d’une Europe élargie au fil des années, à couvrir les aires de répartition des espèces « européennes », aujourd’hui à l’extérieur même du continent. C’est aussi le cas des accords régionaux de la Convention de Bonn qui privilégient l’unité écologique des espèces migratrices à l’unité juridique ou politique à travers la notion « d’Etat de l’aire de répartition » d’une espèce. C’est enfin et surtout la caractéristique essentiel des conventions pour les mers régionales, dont la Méditerranée servie très tôt de terrain d’expérimentation à travers le « système de Barcelone ».
En vertu d’une approche plus politique qu’écologique, le droit communautaire est également à la base de textes contraignants ayant un impact direct sur la conservation de la biodiversité marine d’une partie importante du bassin méditerranéen.


      1. Le droit communautaire


Il n’existe encore aujourd’hui aucune législation spécifique de l’Union Européenne en matière de protection du milieu marin1. Toutefois, l’action réglementaire de la Communauté en matière d’environnement est importante et contribue indirectement à la protection de la Méditerranée. Durant ses premières années d’existence, la Communauté Européenne a été fortement critiquée pour avoir privilégié l’économie et le développement des échanges au détriment de la protection de l’environnement. Après une première phase de prise de conscience (1972- 1985), l’environnement a été consacré en 1986 par les articles 174 et 175 du Traité instituant la Communauté européenne qui lui a conféré le rang de politique. Le Traité d’Amsterdam, entré en vigueur le 1er mai 1999, a poursuivi cette évolution en intégrant le principe de développement durable, et en faisant du niveau élevé de protection et d’amélioration de la qualité de l’environnement une de ses principales priorités2. Disposant de la personnalité juridique, la Communauté Européenne est également Partie à de nombreuses conventions relatives à la protection de la biodiversité3, parmi lesquels figurent la Convention sur la diversité biologique4, la Convention de Berne5 et la Convention de Barcelone6.
Afin de remplir ses obligations relatives à la protection des habitats dans le cadre de la Convention de Berne, la Communauté élabora un dispositif de conservation basé sur deux directives ayant force contraignante pour les Etats membres. La première est dédiée à la protection de l’avifaune (*) européenne7, qui peut-être plus que toute autre espèce nécessitait une approche de conservation cohérente au niveau communautaire8. Cependant, et bien qu’elle impose des mesures spéciales en ce qui concerne la protection des espèces et des habitats, elle restait dans une approche fragmentaire et sectorielle9. De plus, En ratifiant la Convention de Berne en 1981, la Communauté devait adopter un cadre juridique qui permette de mettre en œuvre les dispositions conventionnelles relatives à la protection des habitats. Aussi, le 21 mai 1992, une nouvelle directive communautaire beaucoup plus stricte vient remédier à ces carences. Elle concerne la protection des habitats naturels et des espèces de faune et de flore sauvages autres que les sites et les espèces ornithologiques couverts par le texte de 19791. L’ensemble de ces deux directives vise à la création du réseau écologique communautaire Natura 2000 qui a pour ambition d’enrayer le phénomène de raréfaction de la diversité biologique en Europe.
En matière de politiques sectorielles, celle relative à la pêche concerne directement les aires marines protégées. Initialement limités aux quotas de pêche (taux admissibles de capture), aux mesures techniques puis aux plans d’orientation pluriannuels (POP) destinés à réguler l’effort de pêche, les outils de mise en œuvre d’une politique commune des pêches se sont diversifiés, notamment depuis la réforme de 2002. Les auteurs du livre vert publié en 2001, qui établit un bilan de près de vingt ans de politique commune des pêches (PCP), ont souligné l’insuffisance voir l’inexistante des objectifs environnementaux2. La réforme de 2002 vise désormais à intégrer la protection de l’environnement marin selon une approche écosystémique, considérant les ressources comme étant intimement liées à la qualité du milieu3. A plusieurs reprises, la commission a rappelé les exigences d’une prise en compte accrue de l’environnement au sein de la PCP, notamment à travers l’application de la directive Habitats4. Le projet de règlement communautaire pour la pêche méditerranéenne présenté le 9 octobre 2003 va dans le même sens5, porteur d’innovations importantes au regard du texte actuellement en vigueur6. Cette législation sectorielle communautaire constitue donc désormais une base juridique importante à la notion d’aire marine protégée dans un contexte de gestion halieutique, alors que le droit international des pêches maritimes continue d’ignorer le plus souvent cet outil.

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