Cours de mme tenenbaum





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La vente du fonds de commerce


DOCUMENT 2 : Cass. Com. 26 janvier 1976

 

Sur le moyen unique, pris en ses deux branches : attendu que, selon les énonciations du jugement attaqué (tribunal de grande instance de Narbonne, 20 juin 1974), Egretier a donne a bail à la société Usine du parc des locaux dans lesquels il exploitait un fonds de commerce, qu’il lui a cédé le mois suivant divers éléments matériels de ce fonds ;

Que l’administration fiscale considérant qu’il y avait eu cession du fonds a notifié à ladite société un avis de mise en recouvrement des droits éludés et des pénalités encourues ;

Attendu qu’il est fait grief au jugement d’avoir débouté l’Usine du parc de son opposition à cet acte, alors, selon le pourvoi, que, d’une part, les juges du fond n’ont pas répondu aux conclusions de la société qui faisait valoir que les éléments qu’elle avait acquis ne pouvaient caractériser une mutation secrète de la propriété du fonds de commerce et notamment les brevets d’invention qui lui avaient été cédés n’avaient pas fait partie du fonds, alors que, d’autre part, les juges du fond ont à tort estimé qu’il ne leur appartenait pas de réviser l’évaluation du fonds faite par l’administration et ont reproché à tort à la société de n’avoir pas souscrit une déclaration détaillée à laquelle elle ne pouvait se croire tenue des lors qu’elle croyait avoir seulement acquis des éléments divers et non pas un fonds de commerce ;

Mais attendu, d’une part, que le jugement constate que l’Usine du parc a bénéficié de la clientèle d’Egretier, qu’elle exerçait son activité sous une même enseigne et dans les locaux précédemment utilisés par Egretier ;

Que des achats importants de matière première ont été comptabilises par elle, alors qu’ils faisaient l’objet de factures antérieures au bail, qu’elle a vendu des produits de sa fabrication sous la marque Egretier et qu’elle a repris le compte clients d’Egretier en portant dans un compte ouvert au nom de celui-ci les sommes qu’elle recevait à ce titre ;

Que les juges du fonds, qui n’étaient pas tenus de suivre l’Usine du parc dans le détail de son argumentation, ont ainsi répondu aux écritures de cette société, qui prétendait ne pas avoir acquis le fonds de commerce d’Egretier ;

(…) 

Qu’en ses deux branches, le moyen est mal fonde ;

Par ces motifs : rejette le pourvoi forme contre le jugement rendu le 20 juin 1974 par le tribunal de grande instance de Narbonne.
DOUCMENT 3 : Cass.com. 23 octobre 2007

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 24 mai 2006), que la société de la fromagerie Boursin (la société Boursin) a cédé, par deux actes du 30 juin 2000, à la société anonyme Bongrain (la société) les droits de possession industrielle afférents à la fabrication du fromage Boursault et la marque Boursault ; que ces cessions ont été soumises à l'enregistrement au droit fixe de l'article 731 du code général des impôts ; que par acte du même jour, la société Boursin et la société Nouvelle commerciale Boursin ont cédé à la société par actions simplifiée Bongrain Gérard la clientèle, le matériel et les objets mobiliers servant à l'exploitation de la marque Boursault ; que cette cession a été soumise aux droits d'enregistrement prévus à l'article 719 du code général des impôts ; que l'administration fiscale, estimant que la cession de la marque Boursault et des droits de possession industrielle afférents à la fabrication du fromage Boursault étaient également passibles des droits proportionnels d'enregistrement de l'article 719 du code général des impôts a notifié, le 4 mai 2001, à la société un redressement ; qu'après rejet de sa demande, la société a assigné le directeur des services fiscaux de l'Eure devant le tribunal pour obtenir le dégrèvement de cette imposition ;

Attendu que la société fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande, alors, selon le moyen :

1°/ que l'article 731 du code général des impôts dans sa version applicable à l'espèce énonce que "les cessions de brevets sont enregistrées au droit fixe de 75 euros" et que l'article 719 du code général des impôts soumet aux droits proportionnels d'enregistrement "les mutations de propriété à titre onéreux de fonds de commerce ou de clientèle" ; qu'il résulte de ces dispositions que les cessions de marques ou de droits de possession industrielle sont soumises aux droits fixes de l'article 731 du code général des impôts excepté lorsque ces éléments sont cédés en même temps que le fonds de commerce dont ils dépendent ou, pour ce qui est des marques, lorsque la clientèle qui leur est attachée est également transmise au cessionnaire, auxquels cas lesdites cessions relèvent des tarifs de l'article 719 du code général des impôts ; qu'en l'espèce, il n'est pas contesté que la société Bongrain a acquis par deux actes du 30 juin 2000 la marque Boursault et les droits de possession industrielle afférents à la fabrication du fromage Boursault tandis que la clientèle attachée à cette marque ainsi que le matériel et les objets mobiliers nécessaires à l'exploitation ont été cédés à la société Bongrain Gérard (et non à la société Bongrain SA comme l'affirme la cour par erreur) par un troisième acte du même jour ; que, dès lors, s'agissant de cessions isolées, la cession de la marque Boursault et des droits de possession industrielle doivent être enregistrées au droit fixe de l'article 731 du code général des impôts ; qu'en considérant néanmoins que lesdites cessions devaient être assujetties aux droits prévus à l'article 719 du code général des impôts, la cour a violé les textes susvisés ;

2°/ qu'aux termes de l'article 1134 du code civil "les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites" ; que, par ailleurs, l'article L. 64 du livre des procédures fiscales énonce que "ne peuvent être opposés à l'administration des impôts les actes qui dissimulent la portée véritable d'un contrat ou d'une convention à l'aide de clauses qui donnent ouverture à des droits d'enregistrement ou à une taxe de publicité foncière moins élevés ; L'administration est en droit de restituer son véritable caractère à l'opération litigieuse" ; que si une clientèle est en principe attachée à une marque exploitée aucun texte n'interdit de céder contractuellement de manière séparée ces deux éléments mobiliers composant le fonds de commerce ; qu'en l'espèce, il n'est pas contesté que la marque Boursault a été cédée à la société Bongrain SA et la clientèle attachée à cette marque à la société Bongrain Gérard ; que l'administration n'a pas non plus fait usage de la procédure de répression des abus de droit de l'article L. 64 du livre des procédure fiscale ou remis en cause la valeur des éléments cédés ; que, dès lors, l'existence et la sincérité des actes litigieux n'est pas contestée ; qu'en décidant toutefois que la société Bongrain SA aurait acquis la clientèle attachée à la marque Boursault ainsi que l'ensemble du fonds de commerce, la cour d'appel a violé, par refus d'application, les textes susvisés ;

Mais attendu qu'après avoir rappelé que lorsque la marque est cédée dans le même temps que le fonds qui l'exploite, elle constitue un élément du fonds de commerce et supporte, avec l'ensemble des autres éléments, le droit de mutation applicable aux cessions de fonds de commerce et qu'il en est de même pour la cession des droits de propriété industrielle, dès lors qu'ils sont cédés en même temps que tout ou partie d'un fonds de commerce dont ils dépendent, l'arrêt retient qu'à raison de son exploitation antérieure par la société Boursin, la marque Boursault bénéficiait d'une renommée et d'une notoriété certaines et, de ce fait, d'une clientèle propre qui lui était attachée, de sorte que sa cession, ainsi que celle des droits de possession industrielle, par la société Boursin au profit de la société, devenue ainsi propriétaire de l'ensemble des éléments constitutifs du fonds de commerce afférents à la fabrication et à la vente du fromage Boursault, devait être soumise au droit de mutation de l'article 719 du code général des impôts, peu important que la mutation du fonds ait été opérée par deux cédants au bénéfice de deux acquéreurs ; que la cour d'appel, qui a déduit de ces constatations et appréciations la mutation occulte de l'universalité du fonds de commerce au profit de la société Bongrain, a statué à bon droit ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS : Rejette le pourvoi.
DOCUMENT 4 : Cass. Com. 13 février 1990

Sur le moyen unique :

Vu l'article 5 de la loi du 24 juillet 1966 ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Ratao et MM. Goncalves et Gonsart ont conclu un accord selon lequel ces derniers s'engageaient à acquérir les parts de la société Ratao Frères, propriétaire d'un fonds de commerce, et versaient la somme de 45 000 francs, que la vente n'ayant pas été réalisée, M. Gonsart a demandé le remboursement de cette somme et que les premiers juges ont accueilli sa demande ;

Attendu que, pour confirmer le jugement, l'arrêt retient que, si la cession des parts sociales ne s'analyse pas, fiscalement, en une cession de fonds de commerce, il n'en est pas de même dans les relations entre cédant et cessionnaire, qu'en conséquence la cession litigieuse constituait, au sens de l'article 12 de la loi du 29 juin 1935, une vente de fonds de commerce sous la forme d'un autre contrat et que, faute de comporter les énonciations légales, elle était nulle ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 4 novembre 1987, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rouen
Note P. LE CANNU, Rev. sociétés 1990.251, note P. LE CANNU

L'arrêt Ratao (RTD com. 1990.185, obs. J. Derruppé, 582, obs. C. Champaud et 590, obs. Y. Reinhard, D. 1990.470, note C. d'Hoir-Lauprêtre) va permettre à de nombreux praticiens de respirer plus librement ; il se prononce avec une grande netteté pour la cassation d'un arrêt qui pouvait créer quelque inquiétude en exigeant les mentions obligatoires de la vente de fonds de commerce pour une convention finalement qualifiée de cession de parts sociales (Versaille, 13e Ch., 4 nov. 1987, Bull. Joly, 1987.975, § 388, note D.L.). Il vient confirmer l'opinion de la Chambre commerciale sur un sujet où la première chambre civile avait employé récemment des formules trop catégoriques (Cass. civ. 1re, 17 nov. 1987, Bull. Joly, 1987.977, § 389, note D. Lepeltier ; Rev. sociétés, 1988.65, et notre note ; RTD com., 1988.423, obs. J. Derruppé ; 454, obs. Y. Reinhard ; M. JEANTIN, La cession massive des titres d'une société et la transmission du fonds de commerce dont la société est propriétaire au regard du droit privé, JCP, éd. N.I.608), qui ont déjà inspiré au moins une autre décision (Bordeaux, 2e Ch., 8 nov. 1989, Bull. Joly, 1990.180, § 47, et nos obs.).

Sur la question, il semble qu'il existe trois positions possibles. Elles guideront les brèves réflexions qui semblent encore utiles, en raison du présent arrêt, sur un sujet déjà bien étudié.

La thèse de l'assimilation automatique.

Cette thèse semble être celle de l'arrêt du 17 novembre 1987. Pour cette décision (qui se prononce sur l'application de la loi du 2 janv. 1970), la cession de la totalité des actions d'une société commerciale exploitant un fonds de commerce porte « nécessairement sur la transmission du fonds de commerce lui-même ». La formule ne laisse guère de liberté d'appréciation. Tout au plus peut-on jouer sur l'objet social, ou sur l'activité effective de la société, en faisant valoir qu'ils ne se résument pas à l'exploitation du fonds en cause. Mais la plasticité de la notion de fonds de commerce peut limiter l'intérêt de ce genre de raisonnement.

De plus, une telle jurisprudence irait vraiment à contre-courant, à une époque où la Cour de cassation et le Conseil d'Etat ont accepté, sur le plan fiscal, de bien faire la différence entre les cessions de droits sociaux et les cessions d'actif (cf. D. LEPELTIER et M. JEANTIN, note et art. préc. ; B. MERCADAL et Ph. JANIN, Sociétés commerciales, 1990, n° 645.9). Enfin, cette position ne cadre guère avec la jurisprudence antérieure relative à la vente de fonds de commerce (J. DERRUPPE, obs. préc.), et en particulier avec celle de la Chambre commerciale sur l'application de la loi Hoguet (Cass. com., 26 févr. 1979, Juris-data, n° 0083).

Dans ces conditions, nonobstant la généralité de la formule employée par la première chambre civile, l'arrêt du 17 novembre 1987 peut donner le sentiment qu'il désire appliquer un traitement égal aux cessions d'actions et aux cessions de parts, comme le suggère une interprétation logique de l'article 1er de la loi du 2 janvier 1970, qu'il s'agissait d'appliquer en la cause (cf. J. DERRUPPE, obs. préc. ; v. cependant les obs. de notre collègue M. JEANTIN, qui considère que la motivation de l'arrêt aurait dû être formulée différemment pour que l'on puisse retenir cette interprétation).

La thèse médiane : requalification aisée.

Face au motif trop peu nuancé de l'arrêt du 17 novembre 1987, la tentation pouvait exister d'une voie moyenne, que symbolise assez bien l'arrêt de la cour d'appel de Bordeaux du 8 novembre 1989 (préc.). Cet arrêt reprend la formule très définitive « cession qui porte nécessairement sur le fonds de commerce lui-même ». Cependant, il n'applique pas la loi Hoguet, mais la loi du 29 juin 1935 ; il prend donc soin de démontrer que le contrat de cession d'actions déguise une vente de fonds de commerce. N'y est-il pas invité par le texte même de l'article 12 de cette loi (« dans tout acte constatant une cession amiable de fonds de commerce, consentie même sous conditions et sous la forme d'un autre contrat..., le vendeur est tenu d'énoncer... ») ?

Pour arriver à cette fin, il souligne le pouvoir de requalification du juge ; puis il observe qu'outre le nombre des actions cédées, la clause de non-concurrence, présentée comme une condition essentielle de la cession, interdit de s'intéresser « à tout commerce similaire de la société ».

Ce genre de notation serait inutile si le nombre des actions cédées révélait à lui seul la nature véritable de l'acte. Mais il faut aussi avouer que l'élément supplémentaire est assez ténu, car la clause de non-concurrence prend bien en compte l'existence de la société ; elle n'est pas uniquement centrée sur le fonds exploité par celle-ci. Un tel élément n'est sans doute pas suffisant devant la Chambre commerciale, dont la position est elle aussi très catégorique, comme le montre le visa de l'arrêt Ratao.

Or, l'arrêt rendu par la Cour de Versailles le 4 novembre 1987 se prêtait lui aussi à une interprétation moyenne. Il relevait que l'acte litigieux combinait plusieurs opérations incompatibles entre elles (une promesse unilatérale d'achat assortie d'un dédit, une promesse de bail commercial consentie par le bailleur et une convention de gérance à durée déterminée ; il est difficile d'acheter et de louer tout à la fois). Il indiquait que « la cession de parts sociales en leur quasi-totalité, 95 %, constituait bien, au sens de l'article 12 précitée, une vente de fonds sous forme d'un autre contrat ».

C'était noyer la référence à l'article 12 et au déguisement de l'acte sous la seule considération de la quantité de parts cédées. De plus, motif aggravant, la cour d'appel commençait son analyse juridique par un motif très entier, qui est épingle dans l'arrêt du 12 février 1990 : « considérant que, même si la cession de parts ne s'analyse pas fiscalement en une cession de fonds de commerce, il n'en est pas de même dans les relations entre cédant et cessionnaire ».

Les juges du fond soumis à la juridiction de la Chambre commerciale sauront mieux désormais que c'est là une voie qu'il ne faut pas suivre. En revanche, un arrêt d'appel motivé par une qualification globale des conventions entre les parties a beaucoup plus de chance de passer l'épreuve du pourvoi. Il faudra noter, élément d'analyse à l'appui, que la commune intention des parties était de céder le fonds de commerce.

La Cour de Versailles (12e Ch., 25 févr. 1988, D. 1988, IR 94) a d'ailleurs rendu un arrêt de ce type depuis l'arrêt cassé, en annulant « la cession de parts de SARL qui n'a eu d'autre but que de dissimuler une cession de fonds de commerce afin de ne pas avoir à fournir les renseignements exigés par l'article 12 de la loi du 29 juin 1935 » (ces expressions sont celles du sommaire de l'arrêt au Dalloz). Mais encore aimerait-on connaître les éléments qui ont permis aux magistrats de connaître la véritable intention des parties. Si cette révélation découle de la seule proportion des parts cédées dans le capital, l'arrêt n'emporte pas l'adhésion.

A titre de contre-épreuve, deux arrêts de la Chambre commerciale de la Cour de cassation exigent des éléments supplémentaires pour requalifier. L'un (17 juill. 1973, D. 1973.605 ; Rev. sociétés 1974, note J.P. Sortais ; RTD com., 1973.830, obs. R. Houin) a approuvé la Cour de Toulouse d'avoir refusé une requalification de la cession de la totalité des actions parce que, postérieurement à la convention, la vie sociale s'était poursuivie à l'initiative du cessionnaire ; deux assemblées générales s'étaient réunies (mais l'arrêt note que la société n'avait qu'un seul actionnaire...), et une augmentation de capital avait été effectuée. Pourtant, dans ce cas, l'unicité d'actionnaire fournissait un élément de requalification tentant. La nouveauté de l'article 9 de la loi de 1966, à l'époque, l'avait désamorcé. Le second arrêt se prononce de la même manière, toujours à propos d'une société à associé unique, mais en se contenant de relever, que, pour la cour d'appel, la simulation n'était pas démontrée (Cass. com., 4 janv. 1971, Rev. sociétés, 1972.239, note J.H. ; RTD com., 1971.650, obs. A. Jauffret ; comp., avant 1966, Paris, 4 nov. 1963, RTD com., 1964.286, obs. A. Jauffret).

La thèse classique : l'autonomie de la personnalité morale.

M. Jean DERRUPPE a montré (obs. préc., RTD com., 1988.423) que la Chambre commerciale de la Cour de cassation n'a admis que très rarement la requalification. Pour lui, seul un arrêt du 29 novembre 1971 (Rev. sociétés 1972.703, note critique B. Oppetit) peut être cité en ce sens, mais il ne se prononce pas sur l'application de la loi de 1935 (c'est un problème de garantie due au cessionnaire nommé président du conseil d'administration, puis révoqué), et les actes en cause étaient particulièrement complexes. De plus, un autre arrêt (3 nov. 1980, Bull. civ. IV, n° 358, p. 288) a bien appliqué la loi de 1935, mais à une promesse de cession de parts souscrite par une personne se portant fort pour tous les associés ; cette personne prenait toutes les décisions nécessaires à la gestion de la société en fonction de ses seuls intérêts et s'occupait seule des affaires sociales ; la cour d'appel a pu en déduire qu'elle était le seul propriétaire exploitant.

Dans un autre cas, la Chambre commerciale n'a pas censuré une cour d'appel qui assimilait à une vente de fonds de commerce la cession des parts sociales à un couple pour lui appliquer la loi de 1935 ; mais la nullité a été écartée dans cette espèce, faute d'erreur des cessionnaires (Cass. com., 2 févr. 1970, Bull. Joly 1970.528, § 183, et l'arrêt frappé de pourvoi, Paris, 5e Ch., 13 oct. 1967, même réf.). Il faut enfin citer un arrêt du 5 février 1970, de la troisième Chambre civile (Bull. Joly 1970.555, § 192), qui a admis la résiliation d'un bail commercial parce que le bailleur n'avait pas été appelé à la cession de toutes les parts de la société locataire. Mais cette décision semble isolée (Cass. civ., 3e, 22 juin 1988, Bull. civ. III, p. 63, n° 114).

En revanche, les autres arrêts de la Chambre commerciale écartent la requalification, parce que les éléments de la simulation ne sont pas établis (en ce sens, 17 avr. 1972, Bull. civ. IV, n° 110, p. 111 ; 12 avr. 1976, Bull. civ. IV. p. 104, n° 121 ; 1er mars 1982, Bull. Joly, 1982.395, § 163).

Le présent arrêt se distingue quand même des précédents par son visa de l'article 5 de la loi du 24 juillet 1966. Mais, de la sorte, il marque son attachement aux principes classiques de la personnalité morale. La cession des parts ou des actions n'équivaut pas à la cession de l'actif, même si cet actif reçoit une qualification globale, qui est celle de fonds de commerce. Le patrimoine de la société doit être distingué du patrimoine des associés ; ce n'est que dans ce dernier que l'on trouve les parts sociales, qui donnent des droits sur le patrimoine de la société.

Ajoutons que la solution doit rester la même si la société dont les parts ou actions sont acquises n'a qu'un seul associé. Il faut en effet que celui-ci décide la dissolution pour que le fonds lui soit personnellement attribué (Art. 1844-5, dernier al., C. civ.). Or, dans cette hypothèse, l'associé unique ne se voit pas seulement transmettre l'actif, mais aussi le passif ; la différence avec la cession de parts ou d'actions apparaît nettement. L'idée a été discutée devant la Cour de Rouen (8 déc. 1988, Juris-data, n° 051096) à propos de la cession de toutes les parts d'une société en nom collectif à une seule personne. Cette cession n'est pas traitée comme une vente de fonds de commerce, car le fonds ne constituait qu'une partie des actifs de la société, le concessionnaire avait acquis les comptes créditeurs, et l'activité s'était poursuivie dans le cadre de la société.

On peut être étonné, dans l'arrêt commenté, par l'absence de toute référence à la possibilité de requalification avancée par l'article 12 de la loi du 29 juin 1935. La cassation est prononcée sur les principes. Il n'est même pas dit que le nombre de parts cédées ne suffit pas, à lui seul, à justifier une assimilation de la cession de ces parts à la vente d'un fonds de commerce. La volonté de couper net aux supputations qu'ouvré l'arrêt du 17 novembre 1987 n'en est que plus claire.

Dès lors, si le motif de cet arrêt de 1987 devait vraiment être pris au pied de la lettre, on serait forcé de conclure à une divergence entre les deux chambres. Nous avons pensé, dès 1987, que cette interprétation n'était pas souhaitable, et probablement pas la bonne. Mais seule la Première chambre civile peut elle-même apporter une réponse dénuée d'équivoque.

Même si elle fait une place à l'habileté juridique, la position de la Chambre commerciale est de très loin préférable. Non seulement elle s'accorde mieux avec l'évolution de la jurisprudence en matière fiscale, non seulement elle correspond aux décisions précédentes de la même chambre, mais encore elle assure la sécurité juridique indispensable à ceux qui concluent de tels actes. Enfin, elle s'appuie sur des principes à la valeur éprouvée et dont les applications sont nombreuses par ailleurs.

La cession de la totalité ou de la quasi-totalité des parts ou actions peut certes justifier quelques particularités. Par exemple, la Chambre commerciale elle-même lui reconnaît un caractère commercial (Cf. not. 28 nov. 1978, D. 1980.316, note. J. Cl. Bousquet ; 28 avr. 1987, Rev. sociétés, 1987.391, note J.-Cl. Bousquet ; mais les juridictions du fond ont tendance à élargir la brèche ; Trib. com. Grenoble, réf. 21 janv. 1988, Rev. jur. com., 1988.224, note D. Vidal ; Trib. com. Paris, réf. 2 avr. 1990, Bull. Joly, 1990). Seulement cette originalité (V. D. ROUX, La spécificité des cessions de contrôle, Rev. sociétés, 1980.49) ne peut aller jusqu'à dénier la nature même du bien transféré, sauf en cas de fraude ou de simulation établie.
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