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Critères de prise en charge en Médecine Physique et de Réadaptation 13) - ACCIDENTS VASCULAIRES CEREBRAUX I - IntroductionL'importance de l'Accident Vasculaire Cérébral (AVC) est majeure dans notre système de soins : - l’incidence est actuellement plutôt croissante (238 nouveaux cas par an pour 100000 habitants, en France), due pour une part à l’allongement de la durée de vie moyenne de la population ; - la prise en charge médicale privilégie, à la phase initiale, la protection de l’état cérébral. Ceci conduit à développer des techniques de soins en constante amélioration, qui sont à mettre en œuvre en urgence : l’AVC est une urgence médicale ; - l'efficacité des modes de prise en charge initiale s’apprécie par le handicap final. Le rôle de la Médecine Physique et de Réadaptation est de valoriser et d’optimiser ce résultat ; - la durée des soins après AVC est longue. Le coût social est très lourd, qu’on l’exprime en termes financiers ou en termes de qualité de vie. Il est donc important d’augmenter l’efficience des moyens mis en œuvre. Au préalable nous tenons ainsi à exprimer deux idées avant même de parler de critères de prise en charge en Médecine Physique et de Réadaptation : - tout AVC doit être médicalisé en urgence, dans une structure apte à mettre en œuvre les moyens actuels de protection cérébrale et de réaliser un bilan lésionnel et étiologique clinique et paraclinique ; - la Médecine Physique et de Réadaptation est concernée par tous les AVC constitués, quelles que soient leur gravité initiale et leur évolution, mais ne l'est pas par les accidents ischémiques transitoires. Il reste à voir comment adapter ce programme à nos structures, ou l’inverse. II - Définitions L’AVC constitué est défini comme un déficit neurologique focal ou général (coma) d’apparition rapide, durant plus de 24 heures, et d’origine vasculaire, hémorragique ou ischémique. Il est à distinguer de l’AVC transitoire de régression rapide dans moins de 24 heures qui justifie un bilan étiologique et une prise en charge médicale préventive d'une récidive. C’est l’AVC constitué, du fait de la persistance d’un déficit neurologique, analysé en termes de déficiences, qui va justifier le recours à la Médecine Physique et de Réadaptation. III - Phase initiale Soins de courte durée : le patient est hospitalisé en soins de courte durée : Neurologie, Réanimation, Service d’Urgence, Service de Médecine Interne, etc., ... * Le médecin de Médecine Physique et de Réadaptation doit intervenir en tant que consultant pour : - évaluer la sévérité de l’atteinte et son évolution précoce, en établissant une analyse précise des déficiences. Ceci permet d’établir un premier pronostic fonctionnel, qui dépend principalement du degré d’intensité des déficiences initiales, du mécanisme lésionnel, des pathologies associées, de l’environnement du patient. Ainsi la persistance dans les 15 premiers jours des déficiences suivantes est un élément de gravité : - troubles de la conscience - absence de contrôle postural - incontinence - troubles de la déglutition - déficience de la communication - inadaptation du comportement - déficiences cognitives (mémoire, orientation, attention) - déficiences praxiques et/ou gnosiques (atteinte des sensibilités, altération du schéma corporel, syndrome de négligence spatiale unilatérale) et association de déficiences ; - contribuer au diagnostic, à la prévention et au traitement des complications du décubitus et aux complications propres à l’AVC : installation du patient au lit et au fauteuil, adaptation de son environnement, adoption de techniques de transfert sans risque, protection du membre supérieur, prise en charge de la spasticité, de la douleur et de la déglutition, prévention de la maladie thromboembolique ; - orienter le patient vers la filière la mieux adaptée : service de Médecine Physique et de Réadaptation, Soins de Suite Médicalisés, structure gériatrique, retour au domicile avec soins gradués ambulatoires, (des soins d’hygiène à l’hospitalisation à domicile), pouvant faire appel à diverses modalités techniques. * Les critères d’orientation principaux sont : - l’âge : la seule indication pertinente est que les problèmes liés au grand âge (notion physiologique plus que chronologique) sont mieux pris en charge en gériatrie ; - les déficiences, en appréciant l’association de déficiences et le degré de sévérité de chacune. Ceci conditionne l’indication des différentes techniques de rééducation. Dès que deux techniques différentes sont indiquées (kinésithérapie, ergothérapie, orthophonie, neuropsychologie...), l’orientation en Médecine Physique et de Réadaptation s’impose ; - la sévérité et surtout l’évolution des déficiences pendant les premiers jours: un déficit grave qui ne montre aucune amélioration n’est pas une indication de prise en charge immédiate en structure d’hospitalisation de Médecine Physique et de Réadaptation ; à l’opposé, une récupération très précoce avec bonne autonomie doit être suivie en ambulatoire, et pouvoir bénéficier si nécessaire d’une prise en charge en hospitalisation de jour ou en cabinet (surveillance médicale et technique de kinésithérapie et orthophonie) ; - l’état cognitif : il s’agit d’apprécier la capacité du patient à comprendre et adhérer à un programme de rééducation. L’existence d’une détérioration globale faisant craindre une évolution vers un état démentiel exclut l’orientation en Médecine Physique et de Réadaptation. Il est cependant difficile à évaluer dans les premiers jours ; - la nécessité d’une surveillance médicale quotidienne ; - la capacités du patient à participer à un programme de rééducation et en particulier la possibilité d’effort (maintien de la position assise prolongée) ; - la proximité des structures disponibles par rapport au domicile. La durée habituelle des soins et l’implication souhaitée de l’entourage familial en font un critère majeur ; - le souhait du patient et/ou de la famille. En résumé, doivent aller : - en structure de Médecine Physique et de Réadaptation, les patients nécessitant des soins complexes de rééducation (plusieurs techniques), et une surveillance médicale justifiant l’hospitalisation, complète ou non ; - en service de Soins de Suite Médicalisés, les patients nécessitant une surveillance médicale, des soins de rééducation simples (une seule technique, moins d’une heure par jour), et/ou dont l’environnement humain et architectural ne permet pas d’envisager un retour au domicile ; - en long séjour, les patients très âgés, polypathologiques (âge physiologique et/ou chronologique supérieur à 85 ans) ; - à domicile, les patients présentant des déficiences suffisamment légères, ne justifiant pas une surveillance médicale quotidienne, nécessitant au maximum une prise en charge kinésithérapique et orthophonique et/ou bénéficiant d’un environnement favorable. * La date de l’admission en structure de Médecine Physique et de Réadaptation : un principe général peut être énoncé : le plus vite possible. Des conditions préalables doivent toutefois être remplies : - le bilan étiologique complet est effectué ; - le schéma thérapeutique est défini et si possible initié ; - en hospitalisation le service de Médecine Physique et de Réadaptation doit disposer de place libre très rapidement ; il doit disposer de moyens permettant d'assurer une prise en charge médicale éventuellement lourde et avoir accès rapidement à une structure de réanimation ; - l’évolutivité cérébrale et l’état neurovégétatif sont stabilisés. IV - Phase secondaire En hospitalisation complète ou de jour en service de Médecine Physique et de Réadaptation ou en ambulatoire (plateaux techniques ou cabinets libéraux), la prise en charge s’effectue à ce stade sous la responsabilité du médecin de Médecine Physique et de Réadaptation. * Les buts de la rééducation sont de favoriser la reprise de la plus grande autonomie possible, de la meilleure communication possible, tout en prenant en charge les problèmes médicaux qui peuvent se présenter : complications, co-morbidité, traitement spécifique de certaines séquelles, contrôle des facteurs de risque (prévention secondaire). Les déficiences évoluent vers l’amélioration. A titre indicatif, 80 % des patients atteignent leur score fonctionnel optimal en 6 semaines, 90 % en 12 semaines. * L’action de rééducation peut se décrire en plusieurs éléments : - évaluer périodiquement les capacités motrices, sensitives, sensorielles, vésico-sphinctériennes, cognitives et relationnelles du patient. Simultanément est évaluée son indépendance fonctionnelle. Pour ces évaluations, plusieurs échelles sont utilisables : évaluation musculaire, Fugl-Meyer, échelle de spasticité, MMSE, tests neuropsychologiques, index de Barthel, MIF-MAF, ADL, Katz,... Toutes ces échelles sont incomplètes et réductrices. Elles ont cependant l’intérêt de donner une représentation objective de l’évolution fonctionnelle de chaque patient, et de permettre des regroupements, des comparaisons. Il faut aussi évaluer l’environnement du patient, dans ses dimensions familiale, sociale, architecturale, professionnelle ; - élaborer un projet thérapeutique personnalisé, en fonction de ces évaluations, et en collaboration avec le patient et son entourage ; - préserver le capital locomoteur et prévenir les complications par un nursing adapté ; - accompagner et diriger la récupération des déficiences initiales ; - adapter le patient et son environnement au handicap résiduel ; - coordonner les actions de tous les intervenants rééducateurs, et les intégrer dans un programme cohérent ; - évaluer les douleurs et mettre en place les différentes thérapeutiques. * Les moyens à mettre en œuvre, dont doit disposer toute structure d’hospitalisation de Médecine Physique et de Réadaptation pour prendre en charge la rééducation d'un AVC, peuvent se détailler par catégories professionnelles : - l'équipe médicale est chargée de la surveillance clinique et paraclinique, du contrôle des facteurs de risque, du dépistage et du traitement des complications. Elle doit pouvoir prendre en charge les pathologies associées, même lourdes. Elle assure la coordination des intervenants et la mise en œuvre du projet thérapeutique personnalisé de chaque patient ; - l’équipe soignante (IDE, aides soignants) prend plus particulièrement en charge l’autonomisation du patient pour les actes de la vie journalière, son environnement immédiat, les problèmes de déglutition et de contrôle sphinctérien dans leur aspect pratique quotidien, les soins cutanés, la surveillance respiratoire, cardio-vasculaire, urinaire et alimentaire ; - les kinésithérapeutes interviennent pour l’entretien articulaire, la lutte contre la spasticité, le réveil de la motricité volontaire, l’électrostimulation fonctionnelle, l’appareillage, le travail des équilibres, le travail fonctionnel ; - les ergothérapeutes participent à l’installation du patient au lit et au fauteuil, à l'adaptation de son environnement, à la mise en œuvre de techniques de transferts sans risque, à la rééducation du membre supérieur, à l’appareillage, à l’autonomisation pour les activités journalières, à la conception des aides techniques, à l’évaluation et la rééducation des fonctions supérieures ; - les orthophonistes interviennent dans la rééducation des troubles phasiques et arthriques, des praxies bucco-faciales, des fonctions supérieures, de la déglutition ; - les neuropsychologues participent à l’évaluation et la rééducation des fonctions cognitives ; - les psychologues interviennent dans la prise en charge et le soutien du patient et de sa famille confrontés au handicap ; - les diététiciennes sont sollicitées pour le contrôle de l’alimentation et de la nutrition, qu’elle soit orale ou entérale ; - les assistantes sociales sont chargées du dossier social du patient, des démarches administratives liées à la situation de handicap, des recherches éventuelles de financements et elles participent à l’élaboration du projet de vie du patient. |